Blog du syndicat FO des municipaux de Laval
Encore une rumeur,
seulement étayée par de simples déductions,
mais quand même…
La privatisation du stationnement va faire l'objet d'une mise en concurrence, c'est la loi (Loi n°93-122 du 29 janvier 1993 modifiée, relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite "loi Sapin").
Pourtant, le nom d'un futur bénéficiaire possible est déjà sur toutes les lèvres. Qu'en est-il vraiment ? Difficile, bien sûr, de le savoir ou de prendre le risque de faire un procès d'intention.
L'enquête
Alors, nous avons décidé d'enquêter pour savoir si la rumeur sur la société qui pourrait gérer le stationnement à Laval est fondée.
En étudiant les archives de la tentative de privatisation de l'eau, en 1992-1993, nous avons retrouvé un article du Courrier de la Mayenne du jeudi 4 février 1993.
Sous la rubrique "Clin d'œil", il est intitulé : "Une publicité qui tombe à… pic".
"Curieux, non ! Simple coïncidence, oui… sans doute. Comme le veut la tradition en cette longue période de vœux, André Pinçon maire de Laval a distribué quelques objets signés "Laval, la vie".
Après le magnifique stylo de l'an dernier, est arrivé cette année un superbe agenda à la couverture dorée à l'or fin représentant le célèbre navigateur lavallois Alain Gerbault. Les premières pages permettent au travers de splendides photographies en couleur de découvrir les monuments, les industries, les lycées, les sports pratiqués, etc…
Ces documents d'une rare qualité donnent à la ville de Laval une belle dimension et ne manqueront pas sans doute de faire venir quelques touristes.
La Saur émerge
Au hasard des publicités qui sont placées dans la dizaine de pages réservées à la ville de Laval, certains ne manqueront pas d'ironiser sur deux pavés. L'un est consacré à la Compagnie Générale des Eaux, l'autre vante les mérites de la SAUR qui s'occupe tout particulièrement de la gestion déléguée dans les métiers liés au cycle de l'eau, au traitement d'eau et à la propreté.
Sans doute s'agit-il d'une simple coïncidence, mais voilà qui ne manquera pas de faire dire à quelques uns qu'il y a bien anguille sous roche quant à l'éventuel projet de privatisation du service Eau et Assainissement.
Voilà bien une publicité qui tombe à pic à défaut de tomber peut-être à l'eau !!!"
Nous avons donc repris à notre compte l'intéressante méthode d'observation pratiquée à l'époque par ce journaliste professionnel.
Nous avons interrogé les gens autour de nous ; plusieurs collègues ont alors fait des rapprochements…
Bon sang, mais c'est bien sûr !!!
Plusieurs amateurs de foot se sont souvenu du match Laval – Clermont, le 19 janvier 2010.
Ce jour-là, Laval recevait Clermont-Ferrand. Le speaker du stade s'époumonait pour saluer, à de multiples reprises, le sponsor de la soirée : Vinci !
Un amour… foot !
Faut dire que les hauts responsables de la municipalité sont devenus des fanas de football, surtout depuis leur arrivée à la mairie. Ils ne ratent pas un match, et c'est l'occasion de fréquenter le gratin local, notamment le patronat. Ah ! le délicieux parfum de la bourgeoisie ! Chabrol pourrait en faire un film…
Probable qu'élus à Béziers, c'eût été le rugby, et à Cambrai, les bêtises…
Et dans le journal du Stade Lavallois "Le terrain de vos émotions" (page 6), il y a ce jour-là une publicité… Vinci !
Avec un texte très enthousiaste pour Laval et son équipe.
Le Parrain
"Vinci Park Ouest, parrain du match Laval Clermont"
Vinci Park Ouest est concessionnaire ou gestionnaire de 12 000 places de stationnement payant dans les régions Bretagne, Pays de la Loire, Poitou-Charentes et Centre. Ses implantations principales sont Tours, aux Sables-d'Ollonne, à Nantes, à Lorient, à Vannes et dans de nombreuses autres villes.
Depuis un an la société Vinci Park est présente à Laval où elle est prestataire de services pour la Ville, assurant l'exploitation des parkings de la cale Gambetta, du Britais, du Théâtre et du grand parking souterrain de la Gare (une solution pratique pour les soirs de match)."
Soulignons tout d'abord que la mission de Vinci est le simple gardiennage de ces parkings, sous le contrôle d'un fonctionnaire de la Mairie qui en assure la stricte régie financière, lui-même sous le contrôle du Trésor Public (ce qui ne sera plus le cas avec la privatisation, où l'argent ira directement dans les caisses de la société privée).
Vinci avait remporté le marché face à une entreprise locale en place et assure cette mission depuis mars 2009. Le terme "exploitation" est donc un peu abusif pour caractériser la situation actuelle. Toutefois, au quotidien, le soutien manifeste de l'adjoint aux finances, plus prompt à donner raison à Vinci qu'aux fonctionnaires territoriaux en place, accorde finalement un certain crédit au fait qu'ils se croient déjà chez eux…
Droit au but !
Dans le même article, le délégué régional de Vinci, "expliquant pourquoi il a choisi d'être le sponsor privilégié du match Laval-Clermont", déclare :
"Nous ne sommes pas encore suffisamment connus à Laval puisque nous ven ons d'arriver. Nous avons remarqué très vite qu'en Mayenne, les gens, mais aussi les décideurs, étaient très foot. Nous avons donc choisi le Stade Lavallois pour nous faire connaître. C'est d'ailleurs ce que nous avons fait avec succès à Tours. Le sponsoring sportif ne nous donne pas de clients supplémentaires directs, mais il nous apporte un relationnel que nous ne trouverions pas ailleurs".
Tout est dit !
Veni, vidi… Vinci !
Le sympathique directeur commercial du Stade Lavallois, observateur tout en finesse de son club et de sa ville, le reconnaît dans Ouest France du 12 mars 2010 :
"Pourquoi être partenaire du Stade Lavallois ?
La couverture médiatique est importante, surtout quand les matchs sont télévisés. Cela permet de faire connaître sa marque sur l'ensemble du territoire. Quant à louer une loge, cela permet de côtoyer d'autres chefs d'entreprise, et de se constituer un réseau de relations. Les affaires se créent par l'intermédiaire du foot. Ça marche un peu comme les clubs service : le Rotary club, le Lion's club… Les affaires ne se concluent pas forcément là, mais les relations entre décideurs politiques et économiques sont facilitées."
Le Général de Gaulle disait que "la politique de la France ne se fait pas à la Corbeille" (la bourse) : celle de Laval se ferait-elle à la troisième mi-temps ?
Concurrence libre et non faussée ?
Dès lors, vous l'avez bien compris, une société candidate éventuelle a su prendre un peu d'avance sur les autres. Mais personne ne saurait douter que la transparence l'emportera, comme toujours.